jeudi 8 décembre 2011

GreenShape, l'envol de l'enfant gigogne

GreenShape, l'envol de l'enfant gigogneFin de la session acoustique, GreenShape quitte Lili pour nous rejoindre. L'air vibre encore quand sa voix feutrée s'élève à nouveau, cette fois sans guitare. A l'occasion de la sortie de son premier album, Storyteller, GreenShape nous parle de sa passion pour la musique, de Kurt et de Paul, d'amour et de cirque, de ring et de fantômes, mais aussi de poupées gigognes, de Tolkien, de 4X4 canadiens, de gaulois et de tatouages. Interview exclusive d'un conteur d'histoires à la voix magique.


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A découvrir  : le making of de Storyteller, l'album de GreenShape :


GreenShape, l'enfant qui rêvait en musique

« GreenShape, c'est une sorte de nom refuge, un nom de héros en carton pâte »

Passage obligé pour entrer dans la 3ème dimension : une paire de lunettes anaglyphes rouge / cyan (en carton, ça suffit).
Pour entrer dans la 3ème dimension, une paire de lunettes anaglyphes rouge / cyan suffit (n'hésitez pas à cliquer sur l'image pour l'agrandir).

D'où vient votre nom de scène GreenShape ?
Je voulais un nom qui évoque quelque chose de flou, qui puisse être tout et n'importe quoi, qui ne se rapporte pas forcément à la musique. GreenShape pourrait aussi bien être une marque de tracteur ou de 4X4 canadien. C'est une sorte de nom refuge, un nom de héros en carton pâte.

Votre première guitare ?
Un jour, j'ai trouvé une guitare dans un placard, chez ma mère. Bon, elle n'a pas fait long feu parce que j'étais petit et que... je l'ai cassée. Ce n'est pas bien, je sais (rires)...

Vous aviez quel âge ?
Quand j'ai commencé la guitare ? Neuf ans. Mais bon, à cet âge-là, on préfère faire du vélo dans les bois avec les copains que jouer de la guitare. C'est à l'adolescence, en découvrant Nirvana, Cat Stevens, Led Zep, tous ces artistes-là, que je m'y suis vraiment mis.

Vous jouez d'autres instruments ?
J'ai fait un peu d'harmonica, d'autres instruments à cordes aussi. En ce moment, j'essaie d'apprendre le piano. Je touche un peu à tout. Dès que ça produit de la musique, ça m'intéresse !

Et le chant ?
Comme pour la guitare, je n'ai jamais pris de cours. Mes parents n'avaient pas d'argent et j'étais assez orgueilleux quand j'étais ado, je voulais tout apprendre tout seul, comme un grand (rires). Finalement, j'ai perdu énormément de temps, bien sûr. Quoi qu'il en soit, dès que j'ai commencé à apprendre à jouer de la guitare, je me suis mis à chanter. Je n'ai jamais eu envie de devenir un guitare héros, j'ai toujours voulu écrire des chansons et chanter en m'accompagnant à la guitare.

GreenShape, le géant qui avait une guitare à la place des mains

« Au fond, on est tous des poupées gigognes, des enfants avec des peaux différentes qui s'additionnent les unes aux autres »

Comment s'est déroulée la création de votre album ?
Ça fait trois ans que je travaille avec mon label actuel, Sober&Gentle. J'ai fait une première maquette avec Mark, le chanteur guitariste du groupe Cocoon, qui m'a beaucoup aidé. Nous devions enregistrer l'album ensemble mais à l'époque, le deuxième album de Cocoon sortait, c'était trop compliqué. J'ai donc atterri chez un Monsieur suédois qui s'appelle Tore Johansson, et je n'ai pas perdu au change puisqu'il a enregistré des artistes comme New Order, A-ha, Franz Ferdinand, les Cardigans, Martha Wainwright, en France, Mathieu Boogaerts... Je suis parti deux semaines à Malmö, en Suède, pour enregistrer l'album avec la quinzaine de titres que j'avais sélectionnés parmi la centaine envoyée à la maison de disques. J'en écris beaucoup, je sais, mais j'adore ça (rires) ! L'enregistrement de Storyteller est une expérience dont je suis sorti un peu changé, je pense. Ça m'a permis de prendre confiance en ce que je faisais, et maintenant que l'album est sorti, je suis  heureux !

GreenShape sur la scène de Ciné 13, le 8 novembre 2011, avec le contrebassiste des Têtes Raides

Parlez-nous de la chanson Storyteller...
Storyteller, c'est un peu la méthode Coué : on se regarde dans un miroir et on se demande ce que l'on est, qui l'on est pour les autres, ce que l'on va devenir... C'est une forme de cheminement, et je trouvais que c'était une bonne ouverture pour un album composé de tranches de vie. On dit que le premier disque est toujours autobiographique ; je ne déroge pas à la règle. Je ne sais pas si vous connaissez la série Monstres et Merveilles, The Storyteller en anglais, produite par Jim Hensen, vous savez, celui qui a créé le Muppet Show. J'adorais cette émission quand j'étais gamin ! L'histoire d'un vieux seigneur (John Hurt), dans sa tour écossaise délabrée, qui racontait des contes et des légendes au coin de sa cheminée avec son chien qui parlait... C'était sublime ! Et dans cette série, il y avait un conte qui s'appelait Le Géant sans cœur. Ce géant avait une ruche à la place du cœur, et il racontait à l'enfant qu'il avait capturé que son cœur était dans un œuf, cet œuf dans un canard, ce canard au fond d'un puits, ce puits sur une île, cette île perdue sur un lac, etc. C'est comme les poupées gigognes, c'est ce que je voulais aborder, aussi, dans cette chanson. À l'âge adulte, on se retrouve confronté avec ce que l'on était enfant, et on s'interroge sur son avenir. Au fond, on est tous des poupées gigognes, des enfants avec des peaux différentes qui s'additionnent les unes aux autres. On ne change pas vraiment, on ne fait qu'ajouter des choses.

Parlez-nous de votre premier single, Feel better...
Feel better, c'est une fuite en avant : j'avais besoin de dire que j'avais envie de me sentir mieux parce qu'à l'époque, je n'allais pas très bien, ça arrive parfois. Et finalement, cette chanson est devenue la plus colorée de l'album ! Elle pourrait tout aussi bien sortir de la bouche d'un gamin qui met la tête entre les genoux et attend que l'orage passe, qui a envie de fuir mais de fuir en sautillant.

Un mot sur le clip de Feel better ?
C'est Alexandre Dinaut, l'un de mes amis, qui l'a réalisé. Alexandre, c'est comme un grand frère pour moi, c'est la personne avec laquelle je m'entends le mieux dans la galaxie ! Pour le clip, on avait envie de quelque chose qui tourne autour du monde du cirque, on voulait cette couleur-là qui rappelle la chaleur qu'il peut y avoir dans la chanson. Le cirque permet aussi d'avoir de belles images, l'atmosphère est très particulière. Enfin, ça nous rappelait des choses que l'on aimait comme People are strange des Doors, Osez Joséphine de Bashung, etc.



Dans l'album Storyteller, y a-t-il un titre qui vous touche plus particulièrement ?
Everglades ; d'ailleurs, c'est avec ce morceau que j'entame mes concerts. C'est le récit d'une histoire d'amour qui aurait pu être magnifique mais qui s'est autodétruite. C'est à la fois l'envie que j'avais de m'occuper de cette personne-là, toute la force que je pouvais y consacrer, et toute l'impuissance qu'en fin de compte j'ai ressentie.

GreenShape, vous et... ?

« La scène, c'est comme la boxe, c'est comme monter sur un ring, sauf que personne vous casse la figure à la fin. »

La ghost folk ?
Il y a deux ans environ, lors d'un concert avec Cocoon à la Maroquinerie, quelqu'un m'a dit : « vous chantez comme un fantôme ». J'ai trouvé que l'expression « ghost folk », c'était pas mal. On parle beaucoup d'aspect fantomatique dans la musique, de son côté spectral.

Les Beatles ?
Ah ! Paul McCartney et moi !... J'ai l'impression que Paul McCartney est le seul artiste dont il soit impossible de reprendre les chansons. On peut reprendre du John Lennon, du George Harrison, mais Paul McCartney, je ne sais pas... Il y a une chose qui m'a toujours complètement subjugué dans tout ça. Sur l'album qu'il a fait il y a six ans [NDRL : Chaos and Creation in the Backyard] avec Nigel Godrich, le producteur de Radiohead, il y a un titre qui s'appelle Too Much Rain : « la la la lalala lala... » [NDLR : sans le son, c'est sûr, ce n'est pas pareil...]. Cette chanson-là, c'est une chanson des Beatles écrite en 2005, post Blackbird, post Let it be. Les Beatles, c'est Paul McCartney, c'est la mélodie dans son état le plus pur et le plus universel.

Qui ça (rires) ? Je n'ai jamais été très Rolling Stone. Il y a quelques chansons que j'aime beaucoup, bien sûr, mais quand on est Beatles, on ne peut pas être Rolling Stone... C'est comme être à la fois PSG et OM.

Certaines de ses chansons me touchent, mais c'est surtout sa façon de chanter qui m'intéresse. Pour Cat Stevens, c'est pareil. A huit ans, quand on découvre ces artistes-là pour la première fois en écoutant les vinyles de son père, on ne comprend rien aux paroles alors on s'attache forcément à la musique ou à la voix. Depuis, évidement, j'ai réécouté le Partisan, Suzanne, etc. Mais j'ai toujours gardé la fraîcheur du premier contact que j'ai eu avec Leonard Cohen.

D'autres artistes qui comptent parmi vos influences musicales, GreenShape ?
Chris Isaak, Led Zep, Radiohead, Neil Young, James Taylor... Beaucoup de musique des années 60-70, en définitive. J'ai grandi avec, et ce n'est pas fini ! Même si j'écoute énormément de musique contemporaine, je reviens toujours vers ces artistes-là. Oh, et il y a aussi Micah P. Hinson ! Je l'écoute en boucle en ce moment, c'est un type extraordinaire qui a une histoire incroyable. Il était à la rue, héroïnomane, et malgré tout, il a réussi à sortir des disques. Aujourd'hui, il fait le tour de la planète avec des chansons qui me font frémir.

Le grunge ?
Il y a un mois, on a joué en première partie de Chokebore, qui a accompagné Nirvana sur la tournée d'In Utero. C'est un groupe incroyable ! C'était mythique de les rencontrer, et surtout, de boire des coups avec eux. Ça c'était cool (rires) ! J'ai toujours été sensible aux mélodies à la fois simples, efficaces et profondes du grunge. Kurt Cobain, c'est... C'est peut-être cliché de le citer mais finalement, c'est la même chose avec les Beatles ou Leonard Cohen, et je n'ai aucun problème avec ça. Et Eddie Vedder ! Ça fait des années que je suis complètement fou de Pearl Jam...

La littérature ?
J'écris un peu mes chansons comme des nouvelles. J'aime beaucoup la littérature japonaise, américaine aussi, avec John Fante, Kerouac, Tennessee Williams. J'adore Boris Vian, forcément, mais aussi Marc Lévy... non, non, c'est une blague (rires) ! Et plein d'autres choses : la littérature fantastique avec Stephen King et Tolkien, l'auteur de mon livre de chevet, Le Seigneur des anneaux, que j'ai bien dû lire dix fois quand j'étais gamin. Mais aujourd'hui, je pense que c'est la littérature anglo-saxonne qui me touche le plus, peut-être parce que j'habite dans une ville qui ressemble à la banlieue mancunienne, c'est très anglicisant comme région, le Nord-Pas-de-Calais. Et puis mes parents habitaient dans un village entouré par les bois, et je me suis toujours senti plus proche de Jack London que de Boris Vian.

L'avenir de notre société ?
Après des millénaires de civilisation, on est toujours des gaulois. On a juste remplacé la massue par les armes à feu. Je suis assez désabusé sur l'avenir de notre société, je ne pense pas qu'il y ait grand chose à attendre des êtres humains dès qu'ils sont en masse ; on peut d'emblée diviser le QI par 30. Je suis optimiste pour les individus pris un à un, mais pas pour notre petite planète. On est comme une fourmilière sur une pomme ; à un moment donné, on arrive au trognon. Je ne sais pas ce qu'il va rester, c'est triste, mais c'est vrai.

Les tatouages ?
Ah ! Les tatouages ! C'est une horreur... et pourtant, j'adore ça ! Se graver quelque chose dans la peau, c'est un acte pur. Seulement quand on commence, on ne peut plus s'arrêter. Mon père en avait aussi, sans doute y a-t-il une part de fascination paternelle. C'est comme la boxe, ça m'a toujours fasciné.

Et justement, la boxe ?
Ah ça, c'est une grande histoire d'amour ! J'en fais encore, mais ce n'est plus comme avant. Quand je boxais en amateur, c'était presque tous les jours. Mais bon, ce n'est pas vraiment compatible avec la musique ; il faut choisir entre les mains cassées ou jouer de la guitare.

La scène ?
C'est pareil, c'est comme la boxe, c'est comme monter sur un ring, sauf que personne vous casse la figure à la fin.

GreenShape sur la scène de Ciné 13, le 8 novembre 2011, avec le contrebassiste des Têtes Raides

GreenShape, l'homme aux 1500 projets à la minute

« La musique, c'est ma femme, mes enfants, mon grand-père, ma grand-mère, c'est toute la famille. »

Quelle place occupe la musique dans votre vie, GreenShape ?
C'est ma femme, mes enfants, mon grand-père, ma grand-mère, c'est toute la famille, la pièce centrale, le phare ! C'est vraiment ça, oui. J'en fais du matin au soir, je pense musique, je mange musique, je dors musique... je ne pense qu'à ça (rires).

Quels sont vos projets ?
Partir en tournée en 2012 (il y aura de nombreuses dates en France, au moins une soixantaine, et on jouera peut-être en Allemagne, en Suisse, en Belgique, et j'espère en Angleterre et dans toute la galaxie (rires) !) ; écrire des chansons, pour moi mais aussi pour les autres ; me lancer dans la production, réaliser des albums pour d'autres artistes ; monter un groupe de rock'n roll... J'ai plein d'idées ! Je voudrais aussi faire le tour du monde en vélo, aller à Tokyo, à New York ! J'ai beaucoup trop de projets en fait, j'ai envie de faire 1500 choses à la minute...

Interview réalisée lundi 5 décembre 2011 par Cécile Duclos

Storyteller, l'album de GreenShape, est sorti le 17 octobre 2011.
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Le premier album de GreenShape :
Storyteller, Sober & Gentle, octobre 2011.
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