lundi 6 février 2012

Interview de Watine : le piano enchanté

Interview de Watine : le piano enchantéAu lendemain de la sortie de Connected Queen, le nouveau single extrait de son dernier album Still Grounds for love, Watine nous ouvre les portes de son univers merveilleux, entre amour et passion, cordes et bruits organiques, William Blake et Ravel, musique celte et électro, Velvet Underground et Chet Baker, chevauchées fantastiques et sinusoïdes, Terre et Destin... Interview de Watine, une artiste aux mille talents.

A lire : Watine, Still Grounds For Love

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Bonus : A la question « Vous et le chant ? », Watine répond :
C’est une question sensible car je ne me sens pas chanteuse, mais plutôt auteur qui chante. Alors, si je suis bien dans l’émotion, j’arrive à faire ressentir les choses, mais il y a des moments où je déteste ma voix.

Interview de Watine : Still Grounds for Love, un rêve éveillé

« L’écriture est presque un mode automatique, guidé par les sonorités, les creux dans la mélodie... » 

Comment décririez-vous l'univers musical de votre dernier album Still Grounds for Love ?
Lyrique, romantique, intime, acoustique, organique... Maud Lübeck (une artiste que j’aime énormément et qui vient d’être signée sur le label Volvox Music) m’a fait un retour d’écoute de l’album qui trouve un  écho en moi :
« A l’image du château ambulant de Miyazaki, ton nouvel album a le pouvoir mystérieux de se déplacer et d’ouvrir ses portes à chaque arrêt sur un nouveau monde, habité par des chansons qui rêvent qu’elles rêvent et qui se jouent des époques et des métamorphoses. »

Quelles ont été vos sources d'inspiration dans l'écriture des textes de Still Grounds for Love  ?  
L’écriture est presque un mode automatique, guidé par les sonorités, les creux dans la mélodie... Et je laisse venir les choses. Je ne suis pas une raconteuse d’histoires a priori, mais plutôt une corde vibratoire et  je m’aperçois que je parle surtout de résilience, de ce que nous devons protéger, de la terre à l’être humain. Il me semble que c’est ma propre expérience de la vie qui fait mon écriture.

Watine

Pouvez-vous nous parler de votre premier single, The Story of that girl ?
On m’a souvent parlé de « murder » balade à la Nick Cave au féminin en référence à ce titre. C'est un titre qui déroule une sinusoïde sur un fond de guitare obsédante, l’histoire d’une femme assez rock 'n' roll qui se demande si elle est ce qu’elle prétend être ! (NDLR : traduction ci-dessous). Tout au long du titre, les passages cool (en référence à Velvet Underground) et les passages dramatiques (à la Blonde Redhead) s'affirment de plus en plus, jusqu'à la fin. La structure peut laisser croire à tout moment que le morceau est dominé tantôt par l'un, tantôt par l'autre... comme dans la vie. Ce titre a retenu l’attention du programmateur des play-lists AIR France, et il s’est retrouvé en très belle compagnie, sur la play-list du 2eme trimestre 2011. Il a boosté l’album de ce fait ! 

THE STORY OF THAT GIRL (traduction de l’auteur)
Honey, écoute l’histoire de cette fille qui veut savoir ce que la vie lui réserve encore. L’histoire de cette fille, je crois bien que c’est la mienne. Ai-je appris du passé, n’ai-je pas couru trop vite, suis-je celle que je prétends être, à croire à l’empathie et à l’humanité ? Honey, apprends-moi l’humilité pour que je fasse confiance à ceux qui disent m’aimer.
La vie est une très longue boucle semée de fusils et de roses, de fuck et de joies. Je ne peux pas oublier que je suis une vieille punkie doll et j’oublie tout sauf le rock 'n' roll. La vie est une très longue course remplie de craintes, de doutes, d’aller-retours et je suis effrayée par tant de choses que je ne sais même pas comment vivre avec ! Suis-je celle que je prétends être, à faire confiance à l’empathie et l’humanité ? Honey, apprends-moi l’humilité pour que je fasse confiance à ceux qui disent m’aimer.
Donne-moi un ticket dans la prochaine course, un ticket gagnant pour que j’y trouve ma place, pour qu’enfin j’atteigne cette chose que je cherche, moi, une fille de rien mais qui se bat pour tout. Suis-je celle que je pense être, en essayant d’élever mon esprit, ou en essayant juste d’être ? Honey, laisse-moi m’envoler là où tout brille là, où l’amour ne meurt jamais. L’amour est une si longue boucle remplie de fuck, de fuite en avant, de larmes et d’apprentissage. Si je laisse échapper de ma gorge tout ce que j’ai refoulé, tu m’entendras hurler au sommet de ma voix. Ce sont d’abruptes pensées d’une vieille baby doll qui essaie de se prémunir d’une longue chute. Je sais au fond ce que je cherche, de l’amour pour tous, encore et encore. Honey, je voudrais me relier à l’humanité, je voudrais apprendre l’humilité pour que je puisse faire confiance à ceux qui disent m’aimer. Je voudrais apprendre la simplicité pour que je puisse aimer les autres quand ils disent m’aimer.

Et de votre prochain single, Connected Queen ?
Connected Queen est un titre que j’ai co-écrit avec David Guérin et qui montre l’universalité de la femme au travers d’une Reine Blanche qui se sent reliée aussi bien à la Terre qu’au divin. Il met en scène la puissance de séduction qui peut émaner d’une femme instinctive et intuitive qui avance par ses doutes et dont la fragilité et la force mêlées semblent être d’une très grande force attractive pour les hommes. Cette femme me fait penser au titre du livre de Clarissa Pinkola Estés, Femmes qui courent avec les loups. J’ai choisi d’écrire ce titre sur 2 tempos différents qui reviennent régulièrement à tour de rôle : un tempo 4/4 et un tempo de valse selon la narration de la femme ou de l’homme.

En images, le clip de Connected Queen extrait du dernier album Still Grounds for Love de Watine (Réalisation : Thomas Guerigen) :


Interview de Watine : l'histoire de Still Grounds for Love

« L’amour est la question, l’amour est la réponse. » (Strong Inside)

Si l'album Still Grounds for Love racontait une histoire, ce serait ?
Une histoire universelle de l’être humain qui a un besoin imparable de communiquer avec son double, son autre, les autres... On commence par dresser le cadre, avec une femme qui pourrait être moi et qui confesse qu’elle aimerait pouvoir faire confiance à ses sentiments, aux autres, à la vie (The story of that girl). Et c’est ensuite un déroulé, soit cette femme se décrit comme flamboyante, universelle, lunaire, fantasque (Connected queen), soit comme une grande amoureuse qui hésite mais retombe dans la souffrance de la passion (The strings of my fate), puis à nouveau elle doute, elle essaie de comprendre pourquoi elle se bat pour l’amour (Trying to). On la retrouve aussi cultivée, sensible, aimant la belle littérature (Books and Lovers), puis elle retrouve cet instinct grégaire si je peux dire, de la fusion, elle parle de la perte du paradis terrestre. L’amour est la question, l’amour est la réponse (Strong Inside). A nouveau, on la voit sautillante, joyeuse lorsqu’elle s’imagine être un architecte dans le ciel avec un hommage au passage à Chet Baker (Architect). Et comme le yin et le yang, comme la sinusoïde dont je parlais plus haut, elle est à nouveau envahie par ses questions existentielles sur la mesure du temps et la place de l’homme, décrit ici comme un marin sur la mer de l’Histoire (Sailors). Pour renforcer ce côté spirituel qui nous habite tous, vient ensuite le titre Le cours de ma vie qui résume assez bien mon indécrottable curiosité sur l’au-delà. Et en forme de conclusion, le titre Grounds for love qui est également le titre de l’album. Dans cette dernière chanson, je reviens sur notre viatique absolu, l’amour avec un grand A, celui dont on est souvent si près sans le savoir : « nous sommes comme une voile que seul l’amour peut gonfler…. »
En concert, Watine chante Sailors (Concert fin de résidence 2 Pièces Cuisine, Le Blanc Mesnil) :

Dans cet album, une chanson vous touche-t-elle plus particulièrement (et pourquoi) ?
C’est le titre Trying to, que j’ai longtemps porté en moi. Je venais de ré-écouter une énième fois, le Boléro de Ravel. Et je regardais souvent l’extrait du film de Lelouch avec cette chorégraphie si singulière et si attachante. Je rêvais de composer une valse lente avec un son plaintif et répétitif. J’aime jouer ce titre, soit seule au piano soit avec mon groupe sur scène. Et j’aime beaucoup le texte que j’y ai collé. «As-tu fait le tour de tout ce qui brillait sans être d’or, as-tu laissé ton âme se perdre dans les plis du sort »… mais la chanson est en anglais !

Extrait du film Les uns et les autres de Claude Lelouch ; le boléro de Ravel, chorégraphie de Maurice Béjart, dansé par Jorge Donn :


Il y a beaucoup d'instruments (et de sons divers) dans Still Grounds for Love ; pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Cet album a été arrangé et réalisé comme le précédent par Nicolas Boscovic. Il connaît mon amour des cordes et des bruits organiques qui évoquent pour moi le silence peuplé qui nous entoure. On retrouve aux côtés des claviers, guitares, violoncelle, tout ce qui peut évoquer le bois, le végétal, le liquide... Mais je protège le secret de sa création avec toutes les ambiances qu’il met en place à partir de sons réels, avec en prime, quelques instruments peu connus du grand public, comme le theremin.

Interview de Watine, au carrefour des arts

« D’une manière générale, j’aime les chevauchées fantastiques, l’onirisme, l’enfance et son monde rêvé… »

Quelles sont vos influences musicales ?
Satie, Ravel, Debussy et avant eux, Bach, et après eux, la musique minimaliste, Steve Reich…; voilà pour la partie classique. La musique celte, la folk et dans une moindre mesure la brit pop. Puis la musique électro qui m’a vraiment ouvert l’esprit aux dentelles que l’on peut tresser autour des instruments de composition. Aussi bien je parle de Boards of Canada que de toute la production scandinave avec pour chef de file, Sigur Rós.

Vous aimez la poésie, quels sont vos poètes préférés ?
Entre tous, William Blake.

Watine

Vous reconnaissez-vous, vous et votre univers musical, dans un film (ou chez un réalisateur) ?

Dans un roman (ou chez un auteur) ?

Sur un tableau (ou chez un artiste peintre) ?
Dali.

Pourriez-vous nous réciter des poèmes (ou extraits de poèmes) ?
J’en écris souvent (rires)! …
« Il faut avoir raison
Au plus profond de soi
Sinon, on ne mène aucun combat
Et tant pis, tant pis si l'on ne vous suit pas
Tant pis si le cortège
Qui passe au loin, se protège
Il faut monter le ton
Il faut avoir raison »

Interview de Watine, musicalement vôtre

«  Le piano ? Ma plus belle histoire d’amour ! »

Vous et le piano ?
Ma plus belle histoire d’amour et mon confident en même temps que mon thérapeute !

Jouez-vous d'autres instruments ?
Non, car j’ai toujours la tentation d’aller me mettre au piano, et je ne prends pas le temps d’apprendre d’autres instruments réellement.

Quel instrument vous bouleverse-t-il le plus ?
Très honnêtement, le piano.. C’est l’instrument le plus complet en terme de sonorités ! J’aime les concerts de musique classique où le piano tient une place importante, voire unique. J’ai profondément aimé écouter les concerts de Glenn Gould qui avait un rapport à son piano et à sa chaise d’enfant absolument bouleversant !

Watine au piano

Comment se déroule la composition (musique et texte) de vos chansons ?
Je m’installe à mon piano, et je laisse mes mains courir... Quand je tiens des harmonies qui me plaisent, je les développe souvent par un pont plus classique, puis j’essaie de trouver le gimmick qui se fredonnera ensuite ! Ce n’est que lorsque toute la chanson est composée, que je me mets à l’écriture, je dirais même que je me mets à la voix. Le texte obéit à la même règle que les autres instruments, il doit trouver une place idéale sans trop bavarder, et c’est ma voix qui va induire le nombre de mots et de phrases.

Quelle place la musique occupe-t-elle dans votre vie (hier et aujourd'hui) ?
Prépondérante de plus en plus, surtout depuis que j’ai décidé d’arrêter de travailler comme salariée. La musique m’apaise et m’élève l’esprit et vice versa. C’est une condition absolue de mon bonheur !

Quand et comment avez-vous décidé de vous lancer dans la musique ?
Très tardivement, après un cursus professionnel intense dans le domaine du voyage. J’ai décidé en 2003 de ne plus attendre pour mettre en forme les compositions que j’entassais depuis plusieurs années. C’est le directeur artistique d’un label qui m’a encouragée à exposer mon travail, alors que je lui présentais d’autres artistes ! Je n’ai sorti mon premier album qu’en 2006, et depuis il y en a eu 3 : 2009 et 2011.

La scène et vous ?
Nouveau challenge depuis fin 2009. J’ai constitué un groupe de scène qui porte également le nom de WATINE, et nous avons fait une petite centaine de concerts à ce jour. Les prochaines dates sont parisiennes : le 17 mars aux Trois Baudets et le 12 avril au Sentier des Halles. Sur scène, je suis assez souvent au clavier, et mes musiciens sont multi-instrumentistes, ce qui nous permet d’avoir un bel éventail d’arrangements, différents de ceux des albums. C’est un univers qui est qualifié de très cinématographique, mais tout de même assez énergique !

Watine en concert

Musicalement, quel est votre rêve le plus fou ?
Un orchestre symphonique qui reprenne ma musique et/ou un chorégraphe qui s’en inspire pour créer un ballet. Un peu mégalo sur ce coup (rires)!

Interview de Watine : destinée et immortalité

« Est-ce que cela infléchit le cours de ma vie, de choisir mon camp quand je ne sais pas quand ni dans quelle mesure, j’ai la vue sur la vie ? »

Si vous pouviez effacer de la liste des défauts de l'être humain deux d'entre eux, ce serait ?
La suffisance et la duperie.

Que pensez-vous du « Destin » ?
Avec un D majuscule... « Est-ce que cela infléchit le cours de ma vie, de choisir mon camp quand je ne sais pas quand ni dans quelle mesure, j’ai la vue sur la vie ?».

Quel est le conte qui vous a le plus marquée, dans votre enfance ?
Pierre et le Loup (conte musical) et Le Petit Prince.

Si vous pouviez vivre la vie d'un personnage de roman, ce serait ?
A inventer... et immortelle.

Vos projets ?
A court terme, tourner au maximum notre nouveau set sur scène ; j’espère que les programmateurs auront envie de nous accompagner ! A moyen terme, des collaborations avec des artistes que j’aime, dans le milieu indépendant. Il y aura un album de remix avant la fin du printemps... A long terme, garder une bonne santé, la curiosité et que je puisse toujours me sentir en verve devant mon piano. Je n’ai pas de projet de nouvel album pour l’instant, mais je travaille sur un projet en français.

Un message pour les lecteurs de la Toile de Pandore ?
… Bonjour ! Amitiés !

Interview réalisée le 27 janvier 2012 par Cécile Duclos

Watine sera en concert :

Watine, Still Grounds For Love, avril 2011

Retrouvez Watine sur le web : sur son site officiel, sur myspace ou sur facebook.

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Le dernier album de Watine :
Still Grounds For Love, Watine, Catgang, avril 2011.
Voir tous les produits (CD, mp3, collectors...) autour de Watine



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