vendredi 15 juin 2012

Interview de Capture, l'homme-machine qui a rompu ses câbles

Interview de Capture, l'homme-machine qui a rompu ses câblesC'est en plein cœur d'un Pigalle noyé sous des trombes d'eau que nous rejoignons Jean-Bertrand Ashraf, alias Capture, dans son antre parisien, véritable havre de paix contre vents et marées. Un mince filet de lumière perce l'épaisse masse nuageuse, le thé est servi. Une douce torpeur nous enveloppe bientôt. Aussi prévenant que passionné, Jean-Bertrand Ashraf nous parle alors de son premier album Life Support Machine, puis de claviers et de batterie, de respirateur artificiel et d’émancipation, de cage et de boa, de David Bowie et de Depeche Mode, de Daft Punk et de Bach, de Nietzsche et de Victor Hugo, d'Edward aux mains d'argent et de Kubrick, de Leonard de Vinci et d'Au Clair de la Lune... Interview de Capture, l'homme-machine qui a rompu ses câbles.

A lire : Capture, Life Support Machine

Pour ouvrir la boîte de Pandore, c'est ici...
Bonus : Lorsque l'on demande à Jean-Bertrand Ashraf ce qu'il irait voir du ciel s'il avait le pouvoir de voler, celui-ci répond :
Je n'irais pas voir quelque chose en particulier ; voler, tout simplement, ce serait déjà génial (rires) ! Je ferais le tour du monde je crois !

Interview de Capture, l'homme-boa capturé par la musique

« En tant que musicien, on capture un univers tout en étant soi-même capturé par la musique. »

Capture est-il un groupe ou un projet solo ?
Je suis auteur, compositeur, interprète et producteur ; à la base, Capture est un projet solo même si ce n'est pas par choix, puisque lorsque j'ai commencé à faire de la musique sur Paris, je ne connaissais personne. Aujourd'hui, d'autres personnes se sont greffées sur le projet et pour les concerts à venir, nous serons trois. Un peu plus comme un groupe finalement (rires) !

Comment avez-vous eu l'idée de monter ce projet ?
Je me suis remis à la musique il y a 4 ans environ, après avoir arrêté pendant plus de dix ans. La musique, c'était mon rêve ; et c'était devenu un besoin, une nécessité. J'ai donc acheté du matériel, puis doucement, j'ai recommencé à joué. Lorsque j'ai eu quelques compositions qui tenaient la route, je me suis mis en quête d'un studio d'enregistrement. C'est à ce moment-là que j'ai découvert Malambo où j'ai enregistré l'album. Ma musique étant plus anglo-saxonne que française, j'avais besoin d'une aide extérieure ; je craignais que dans l'hexagone, mes compositions ne soient pas bien perçues. Dans les studios Malambo, tout s'est bien passé, on s'est tout de suite très bien entendu ; et on m'a accompagné, c'est une chance pour moi !

Capture

Pouvez-vous nous parler de votre nom de scène, « Capture » ?
J'avais, je crois, ce nom de scène avant de commencer à vraiment composer. Il me plaisait bien parce que c'est un mot qui se prononce à peu près pareil dans toutes les langues, et parce qu'en tant que musicien, on capture un univers tout en étant soi-même capturé par la musique. Au début, j'hésitais avec un autre mot, « boa » (rires) – comme un serpent ! – ; mais finalement, on m'a fait comprendre que « non » (rires), ça n'irait pas.

Quelles sont vos influences musicales ?
Elles remontent aux années 80 avec David Bowie, Depeche Mode, The Cure, New Order. Ensuite, il y a eu la vague electro : française avec Daft Punk, anglaise avec notamment Orbital. Et puis il y a plein d'autres groupes, comme Goldfrapp, que j'aime beaucoup. J'écoute aussi de la musique classique – que j'ai découverte enfant –. Finalement, j'écoute un peu de tout, excepté le jazz et le reggae.

Life Support Machine, l'album de l'émancipation

« A un moment donné, il faut accepter nos erreurs, les erreurs de nos parents, toute ce qui constitue notre histoire personnelle, pour pouvoir poursuivre notre chemin sans forcément sentir toutes ces choses peser sur nos épaules. »

Est-ce vous qui jouez des instruments présents sur l'album Life Support Machine ?
Je me suis occupé de la plupart des claviers, et l'on a fait intervenir des musiciens pour la basse, la batterie et la guitare. Pas sur tous les morceaux, mais sur la plupart. C'est Laurent Compignie, le réalisateur de l'album, qui a regroupé les musiciens, d'excellents musiciens ! Dominique Bertram, Loïc Pontieux, Xavier Hamon... Ils sont tous venus, nous avons un peu répété ensemble, puis nous avons enregistré.

Comment s'est passée la création de l'album ?
Pour cet album, j'ai d'abord écrit la musique, puis les mélodies, et après seulement les paroles. Mais aujourd'hui, vu que je m'assume en tant que chanteur, je ne compose plus tout à fait de la même façon, je trouve souvent la mélodie avec la musique. Les deux sont liées, il me suffit de jouer et de chanter en même temps.

Parlez-nous du titre de l'album Life Support Machine.
« Life Support Machine » signifie « respirateur artificiel ». Pendant toute la création de cet album – et au détriment du reste ! – , j'étais entouré de machines, branché à elles. C'était comme si elles me maintenaient en vie ; j'étais complètement dépendant et en même temps, cela m'apportait une certaine joie de vivre. Donc voilà, j'ai trouvé que Life Support Machine convenait bien à cette expérience !

Quels thèmes abordez-vous dans les paroles de votre album Life Support Machine ?
Le thème privilégié – je ne l'ai pas fait exprès (rires) ! – , c'est l'émancipation. L'idée de parvenir à se libérer de son passé pour devenir soi-même, pour devenir un homme. A un moment donné, il faut accepter nos erreurs, les erreurs de nos parents, toute ce qui constitue notre histoire personnelle, pour pouvoir poursuivre notre chemin sans forcément sentir toutes ces choses peser sur nos épaules. Et puis il y a le thème du sexe, aussi, de façon amusante et caricaturale.

Passage obligé pour entrer dans la 3ème dimension : une paire de lunettes anaglyphes rouge / cyan (en carton, ça suffit).
Pour entrer dans la 3ème dimension, une paire de lunettes anaglyphes rouge / cyan suffit (n'hésitez pas à cliquer sur l'image pour l'agrandir).

Si votre album était une machine, ce serait ?
Un synthétiseur.

Une expression ou un proverbe ?
« Si tu veux le repos, crois, si tu veux la vérité, cherche et souffre » (Nietzsche)

Un mot ?
Émancipation.

Un personnage fictif ?
Edward aux mains d'argent.

Un souvenir ?
Un bon souvenir, mais un peu douloureux en même temps. Quelque chose dont on aime se souvenir parce que l'on s'en est sorti.

L'une des chansons de votre album vous touche-t-elle plus particulièrement ?
La dernière chanson de l'album, United States. C'est un morceau que j'adore ! Et Heavenly body ; à chanter, elle est très agréable ! Après, chaque titre me rappelle une période de ma vie, donc tous me touchent, bien sûr.

Interview de Capture, entre claviers et micros

« En concert, je préfère me consacrer au chant et au show. Derrière un clavier, ce n'est pas très spectaculaire !... Être sur le devant de la scène et chanter, c'est déjà pas mal (rires) ! »

Musicalement parlant, que s'est-il passé dans votre vie avant ce premier album ?
Quand j'étais plus jeune, j'avais un groupe à Toulon qui s'appelait Smart Depression (rires). On était trois et on s'amusait bien ensemble. Ce n'était pas très sérieux, c'est vrai, mais cela m'a permis de faire mes armes, comme aller vendre notre musique au Midem ! C'était une très bonne expérience en tout cas. Puis j'ai arrêté – je devais avoir 22 ans –, parce qu'il fallait travailler. Je n'ai repris qu'à 35 ans, mais je pense qu'avant, je n'étais pas assez mûr pour vraiment faire de la musique. Aujourd'hui, ça va mieux ; je suis plus mature, tout simplement.

Et vous chantiez avant ?
Non, pas du tout. Je me suis mis à chanter parce que j'étais seul, je n'avais pas le choix.

Pour les concerts à venir, vous chanterez en jouant du clavier ?
Non, je chanterai uniquement. En concert, je préfère me consacrer au chant et au show. Derrière un clavier, ce n'est pas très spectaculaire !... Être sur le devant de la scène et chanter, c'est déjà pas mal (rires) !

Jouez-vous d'un ou de plusieurs instrument(s) ? Comment avez-vous appris la musique ?
A 8 ans, je voulais faire de la batterie mais j'étais trop jeune aux yeux de mes parents. On m'a proposé le piano à la place, j'en ai donc fait pendant un peu plus d'un an. Puis j'ai commencé la batterie, mais cela n'a pas duré : j'avais envie de jouer, de m'amuser, et le professeur était très carré – il avait raison ! –. Alors j'ai tout laissé tomber, jusqu'à 12 ans environ. Je me suis alors remis à jouer, ce que j'écoutais, cette fois-ci. Ça allait du classique – ma sœur jouait très bien du piano ! – à du Depeche Mode. Du coup, j'ai plutôt appris à jouer d'oreille ; aujourd'hui, je ne sais plus lire le solfège. Je ne saurais pas jouer une partition d'Au Clair de la Lune mais d'oreille, je pourrais jouer un morceau de Bach que je connais. C'est de cette façon-là que j'ai appris à connaître le clavier – et la musique ! –, à l'oreille.

Interview de Capture hors de sa cage


Pouvez-vous nous citer une peinture qui vous bouleverse ?
La Bataille d'Anghiari, une fresque de Leonard de Vinci que l'on a perdue depuis, puisqu'elle a été recouverte – on la connaît grâce à deux reproductions d'époque qui n'ont plus leurs couleurs, mais qui restent très jolies –. Il y a des cavaliers qui se fracassent les uns contre les autres, une telle puissance se dégage de cette fresque !... C'est monumental. A l'époque, c'était comme La Joconde aujourd'hui, un chef d’œuvre de perfection ! Je ne suis pas très sensible à la peinture, mais cette œuvre m'a vraiment marqué ; elle est tout simplement bouleversante, de puissance et de précision !

Passage obligé pour entrer dans la 3ème dimension : une paire de lunettes anaglyphes rouge / cyan (en carton, ça suffit).
Pour entrer dans la 3ème dimension, une paire de lunettes anaglyphes rouge / cyan suffit (n'hésitez pas à cliquer sur l'image pour l'agrandir).

Un écrivain ?
Churchill, qui n'est pas très connu en tant qu'écrivain, mais qui a écrit quelques biographies ; j'aime beaucoup son style. Et Victor Hugo !

Un philosophe ?
Nietzsche.

Un musicien ?
Là, c'est plus difficile !... Mozart ? Être capable de composer un concerto à 5 ans, c'est incroyable ! Sinon, Martin L. Gore, le compositeur de Depeche Mode, un musicien absolument fabuleux qui ne vit que pour la musique !

Quel cinéaste correspondrait-il le mieux à votre univers musical ?
Kubrick, pour son côté très contrasté. C'est ce que j'essaie d'atteindre par la musique.

Vous parlez de « cage  » dans votre album ; quelle serait, pour vous, la pire des cages ?
Avant de faire de la musique, je vivais dans une « cage ». J'étais coincé entre la nécessite de travailler – énormément ! –, de gagner ma vie comme on me l'avait appris, et l'envie de faire ce que je voulais. Ça a duré pratiquement 15 ans, et même si j'avais un bon travail et que je gagnais bien ma vie, c'était une véritable torture ! Cette situation, je la vivais très mal, ça a été terrible. C'est pour cette raison que je parle d'émancipation. Pour sortir de cette cage, il faut s'émanciper, être capable d'aller au-delà de ce pour lequel on a été programmé. Mes parents ne voulaient pas que je fasse de la musique, ils voulaient que je travaille. Alors je les ai suivis jusqu'à un certain point, jusqu'à ce que je n'en puisse plus. Et c'est à ce moment-là que j'ai commencé la musique. Pour mes parents, ça a été un peu difficile au début, mais maintenant, tout va bien.

Et quel a été le déclic ?
Je crois que j'étais juste arrivé à un moment de ma vie où cela devait se faire. D'un point de vue privé, j'étais dans une relation très apaisante, sécurisante – ma vie, finalement, était assez carrée –, et cela m'a permis de préparer ce projet. Mais je ne me suis pas dit que j'allais faire un album du jour au lendemain, cela s'est fait petit à petit. Quant au déclic, je ne sais pas trop... L'âge peut-être ? Quand cela fait plus de 10 ans que l'on se freine...

Quels sont vos projets ?
Je serai en concert le 5 juillet au Sentier des Halles. Il y aura d'autres dates ensuite, à Paris et en province – à la rentrée, je serai à Toulon par exemple –. Nous allons aussi enregistrer un nouveau disque pour la rentrée, un EP de 4 titres – qui ne sont pas sur l'album –, des morceaux que j'aime beaucoup (rires) !

Interview réalisée le 21 mai par Cécile Duclos

Capture, Life Support Machine, janvier 2012

Retrouvez Capture sur le web : sur myspace, sur facebook et sur twitter.

Capture sera en concert le 5 juillet au Sentier des halles
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